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Comment l’Art, qui pour créer le Beau a besoin du secours de la Raison, peut-il dès lors surprendre et créer l’émerveillement ? Dans un geste d’interprétation comme celui de la mise en scène, et de façon particulièrement sensible dans le cas du spectacle baroque, deux hypothèses également invérifiables s’affrontent et se repoussent. La première affirme que l’on pourrait intégralement, dans son ensemble et dans tous ses détails, déduire de façon objective une mise au théâtre à partir des consignes fournies par les sources ; la mise en scène serait alors un acte de transposition presque automatique et le metteur en scène un simple exécutant. La seconde prêche que la mise au théâtre d’une œuvre est une traduction de l’original du passé vers un mode présent, et dont le vouloir du metteur en scène, qui accède à la fois à la vérité de l’œuvre et au langage de ses contemporains, serait le truchement subjectif. Entre ces attitudes extrêmes, impossibles, la liberté que se voit contraint de prendre l’interprète est-elle une simple affaire de curseur ?

Cambise, de Domenico Lalli et Alessandro Scarlatti, est un « cas » parfait pour appréhender ce clivage et ce questionner ce positionnement. Les sources sont prolixes en indications pour la mise au théâtre, la partition venant –fait exceptionnel– redoubler le livret en recelent des indications de mise en scène à la fois distinctes et complémentaires. Il semble donc possible, en mettant ces deux sources en relation avec un certain nombre de sources contextuelles –ce que l’on sait des spectacles de l’époque– de reconstruire une représentation idéale, originelle, de l’ouvrage.

Or, c’est justement là que l’information est incomplète. En effet, nous ne connaissons, et ne pourrons jamais connaître complètement, les conditions et les modes de la mise au théâtre au dix-huitième siècle. L’hypothèse de la reconstitution totale est donc un phantasme. Surtout, le public –à qui ce travail est destiné– ne connaîtra jamais mieux l’époque que les artistes qui sont en charge de recréer le spectacle. Faut-il donc ne mettre sur scène que des images modernes, pour que le public en reconnaisse le sens ? L’expérience a montré que dans ce cas, la dichotomie entre le texte musical et les images était difficile à vivre, génératrice de confusion et non de sens, anecdotique et souvent au détriment de l’œuvre.

Le respect du texte –littéraire et musical–  est donc le l’autre garant, avec la compréhension par le public, de la valeur de l’entreprise. Comment donc faire comprendre un texte à des hommes et des femmes qui n’en parlent plus la langue ?

Dans le cadre de la Bourse de Réalisation "MUZIO", nous avons fait le choix d’explorer, aussi loin que possible, les deux directions. Il y a donc, pour commencer, de multiples traductions, transpositions, analyses, synthèses, du texte original. Le présent volume rend compte de ces interprétations littérales du texte, en commençant par en donner une traduction en français, destinée à la lecture à voix haute.

Il y a aussi, rendue possible par ce travail d’exploration, de recherche, de synthèse et de compréhension accompli, la part du rêve, la liberté d’exprimer une chose par une autre, d’être un homme de son temps tout en connaissant intimement le passé. Il y a surtout la poésie rendue au metteur en scène que le dix-huitième siècle, s’il ne l’a pas connu, a créé, c’est-à-dire son arbitraire à dire une œuvre qu’il porte désormais en lui selon des termes qui sont ceux de sa vie quotidienne de jardinier des idées. Le spectacle est cette expression vivante d’une fréquentation du passé propre à illuminer nos vies présentes.

Rémy-Michel Trotier
31 juillet 2003

 

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